All delighted people

[ till i collapse ]
w. @belly sheppard

tw: —

Le premier coup fait taire le bruit dans sa tête.
Le deuxième coup apaise la douleur. Et le troisième suit avant de préparer le quatrième. Tout son corps lui fait mal, l’impression de se réveiller d’un lendemain de veille, plein de courbature ou peut-être est-ce le signe que son âge ne peut plus suivre le quotidien de la vie. Comme signe qu’elle est rendue trop vieille pour rester assise, une soirée entière, à un tabouret du bar, le seul mouvement étant celui de son bras pour apporter le verre à ses lèvres, parfois celui du doigt pour aviser du verre vide. Le mouvement répétitif. Toujours le même. Toujours dans le but de ne pas regarder dans les yeux la vie dans laquelle Salomea se trouve depuis son arrivée à Bar Harbor.

Un mariage perdu par le manque de sentiments.
Une relation détruite par la vérité.
Il lui reste quoi à Salomea? Des nuits qui se ressemblent. Une répétition de la même soirée.
Du matin au soir jusqu’à la nuit où dès le moment qui se présente à Salomea. Parce que le moment que la nuit s’installe et que les étoiles commencent à scintiller dans le ciel, Salomea abandonne son poste de travail et prend le chemin du bar et là, l’alcool s’avale aussi facilement qu’un bon repas. Ça apaise l’appétit quelques heures, jusqu’au réveil.

Ça a le goût de regrets. D’abandon ; de lâcheté.
Ça a un goût amer, qui traîne dans sa bouche. Qui ne veut pas la laisser tranquille et le seul moyen qu’elle a trouvé pour ne plus avoir l’impression d’une continuité de la même soirée, c’est dans les séances de boxe. Les moments où elle laisse ses poings dans les gants évacuer sa colère, sa tristesse, tous les sentiments que Salomea peut ressentir dans une journée, une semaine, un mois. Les visites sont fréquentes, régulières, l’une des seules habitudes qu’elle a réussi à conserver depuis son arrivée, son retour plutôt, à Bar Harbor. Inflige un nouveau coup au sac, un dernier avant de s’octroyer une pause. Une respiration, une gorgée d’eau, n’importe quoi qui aidera à calmer ses poumons qui lui semblent en feu. Tout son corps lui fait mal, mais un mal qui fait du bien. Un mal pour un bien. Sa tête se tourne à la droite, écoute les conversations quelques secondes avant de la tourner à la gauche et apercevoir Belly. « Mon corps va me détester demain matin, je le sens. » Qu’elle dit Salomea en ricanant légèrement pour une rare fois, ça ne lui arrive plus aussi souvent qu’auparavant, ricaner et le son est étrange. Presque mélodieux. « J’ai vraiment donné tout ce que j’avais dans ces coups, je pense avoir évacuer tous les sentiments de cette semaine. » Jusqu’à la prochaine séance, jusqu’aux prochains sentiments qui vont venir l’attaquer sans attendre son consentement.