Mimosa sunday (di&abe)
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Diana Hughes connait les lieux, elle est déjà venue, souvent, puisqu’il occupe le même appartement depuis son retour à Bar Harbor. Avec du recul Abel se dit qu’il aurait du acheter (le salaire du Bella Vista lui aurait permis d’accéder à la propriété facilement), et encore avec du recul, il se dit qu’un propriétaire est plus simple à gérer qu’un conseiller bancaire. Surtout maintenant que ses économies fondent comme neige au soleil, servant à colmater les trous du Fisherman’s Cove.
Il en faut plus pour apitoyer un Shapiro, cela dit, habitué à gérer des emmerdes au quotidien depuis la naissance. C’est inné, chez eux, alors pas de quoi les effrayer. Aujourd’hui, il a donc convié une autre habituée des emmerdes à venir jouer les cobayes. Après avoir revu la carte des repas au Fisherman’s pour optimiser au mieux les services, il a décidé de s’attaquer à l’offre brunch qui sera disponible uniquement les week-ends. Une bonne brasserie doit proposer un brunch. Sinon les gens vont manger ailleurs le dimanche midi.
La plupart des préparations sont prêtes et n’attendent que leur convive. Œufs brouillés, pancakes – et son lemon curd, bacon grillé, salmon-avocado toast et salade de fruits, entre autres, sont disposés sur la table à manger. Abel souffle alors qu’on toque à la porte, just in time. Il préfère que tout soit prêts pour pouvoir ensuite profiter de la présence de son amie. Et c’est avec un grand sourire qu’il ouvre à Diana Hughes. « Here she is ! » s’enthousiasme-t-il, ouvrant les bras pour l’y accueillir le temps d’une accolade amicale. « What's up, Di ? Everything's ready, I was just waiting for you, » et de la laisser entrer, porte bientôt refermée derrière elle.
@diana Hughes
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Abel, tu ne sais pas si tu l’as un jour rencontré.
Tu n’as pas le moindre souvenir d’avant. Avant de le compter parmi ces amis que l’on finit par faire rentrer dans la case "proches". Un proche, ça veut tout et rien dire. Mais ça signifie sûrement cela: quelqu’un que l’on compte dans sa vie depuis trop longtemps pour se souvenir de lorsque ça n’était pas encore le cas.
Vous vous êtes endormies après une énième dispute. Elle voudrait que vous vous 'cassiez de ce trou à rat'. Mais ce trou à rat, c'est aussi Abel. C’est Sharon, Marilyn, Elvis et tous les autres. Ça ne lui plait plus, mais ça te convient encore assez pour ne pas flamber vos quelques économies pour rejoindre une destination où elle n’aura plus que toi comme horizon. T’en as la boule au ventre de vous imaginer celles, qu’elle réalise à quel point tu ne lui es pas indispensable.
Elle a hurlé. Enchainant les reproches et quelques insultes, jusqu’à s’épuiser. Tu t’es contentée de l’ignorer. Ce matin, tu as quitté la maison au petit matin, tu as rejoint le garage où les jumeaux trainent forcément leur carcasse à la recherche d’une nouvelle connerie à faire. Vous avez bavardé, vous avez rigolé. L’espace de quelques instants, tu l’as oubliée. Tu t’es mordu les lèvres deux ou trois fois avant de cracher le morceau de cette grossesse qui te fout suffisamment la paix pour le moment pour ne pas être ébruitée. On attend la fin du premier trimestre qu’elle a dit, c’est plus sûr comme ça, et puis, c’est notre petit secret. Toi, t’as surtout compris qu’elle voulait vous garder pour elle seule.
Di where r u ?
Tu ne réponds pas. Qu’elle aille prendre l’air un peu, t’as d’autres chats plus urgents à fouetter. Comme le vieux qui vous sert de géniteur par exemple.
On est dimanche, les problèmes peuvent bien attendre la semaine prochaine.
Di pls…
Tu souffles devant l’écran qui s’assombrit progressivement. Arrivée devant la porte de l’appartement d’Abel, tu ne te contentes pas de mute l’appareil, tu l’éteins complètement.
T’oscilles toujours entre la princesse cambouis et la reine de la débrouille allergique à la crasse. Les garçons t’ont connue et supportée dans chacun de ces petits rôles d’aristo de pacotille. T’es pas une de Rafélis de mes deux, il n’y a que dans le cœur de ta mère que tu supplantes tous les empires du monde.
Shapiro sent le frais, contrairement à toi. Son appartement empeste la charcuterie cuite et tu camoufles un léger haut le cœur. Ses talents culinaires ne pourront rien face aux nausées et tu n’es pas la plus à plaindre.
Nouvel haut le cœur. Tu glisses un clin d’œil, manque de t’enquérir de son bien-être. Soi-même avant tout autre, mais jamais avant elle, qui vous surnommez madame, pour les grands airs qu’elle a toujours pris. Les garçons n’ont jamais beaucoup aimé ta petite amie.
Abi’s always on a mood…
Tu plaisantes légèrement sur la situation que tu sais catastrophique. Vous avez toujours connu les emmerdes, mais celles du Fisherman’s Cove les surpassent toutes.
Il n’a pas compris ton dernier texto. Ça peut bien atteindre que vous soyez à table.
Tu languis sur chaque syllabe, te donnes un petit air cérémonieux, il a l’air d’avoir mis les petits plats dans les grands, attend jouer le jeu.
@Abel Shapiro
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Une fois la porte refermée derrière elle, Shapiro lui indique la table où elle peut s’installer et se dirige vers le plan de travail sur lequel attendent des oranges. Pas de mimosa, mais elle aura un jus d’orange pressé bien frais. « Abi is born on a mood, and she’s too busy trying to be a man to understand Champagne, » raille-t-il, un rictus goguenard sur le bord des lèvres tandis qu’il sépare une orange en deux à l’aide d’un couteau de cuisine bien aiguisé. Son regard bleu vacille vers Diana « Never tell her I said that, » il se marre un peu, en vrai, parce que c’est trop facile de charrier Abigail sur sa façon de vouloir toujours tout gérer et prouver qu’elle est capable et qu’aucun mec ne lui dira ce qu’elle doit faire et nianianiania. C’est un truc qu’il admire chez elle, dans le fond, mais qui peut se révéler parfois assez agaçant.
« The usual shit, » il soupire pour répondre à ce qui se passe actuellement dans sa vie. Rien de neuf sous le soleil, toujours le Fisherman’s Cove et ses galères. Abel hausse les épaules, et tire le presse-agrume près de lui, « I’m listening to a new podcast on positive thinking, so… apparently if you think positive… positive will come to you. Like… it’s a circle. » explique-t-il, concentré sur le pressage de ses oranges. On peut déceler une pointe d’ironie dans ses propos. Presque de cynisme. Forcément. « Don’t say it’s bullshit, I need to believe it’s true, at least for a few days… » il décroche un sourire, seulement à moitié convaincu, mais probablement qu’il a besoin, oui, d’y croire un peu, même si Abel Shapiro n’a jamais eu de mal à continuer de ramer contre des vents contraires. « Namasté, bitch, » la remercie-t-il en joignant les mains devant lui et se penchant en avant comme n’importe quel maître yogi confirmé. Zen is the new chic, right ?
« What’s your big news ? » s’enquiert-il alors. Et le jus d’orange versé dans un verre est servi à la brune.
@diana Hughes
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Tu voles un raisin du bol qui dégueule presque de fruits coupés au millimètre près.
Abel ne rigole pas en termes d’accueil, ni en termes de quantité.
Sa remarque sur son ainée te fait rouler des yeux dans un sourire de connivence.
Pour être honnête, Abigail t’as toujours foutu les jetons. Toujours à vouloir vous materner, vous empêcher de faire tout et surtout n’importe quoi. Ça, ça t’emmerdait, mais ce n’était pas le pire.
Le pire, c’est son regard, qui n’a jamais souligné les courbes de ton mètre soixante-treize de beaucoup d’appréciation.
Alors Abi, tu l’évites comme la peste.
Tu te retiens pas mal de faire le moindre commentaire devant Abel, te contentes d’acquiescer sans ajouter, parce que tu ne veux pas foutre un peu plus de bordel dans cette amitié si particulière qui est la vôtre.
Surement parce qu’elle a trop de valeur pour être gâchée par une bêtise pareille.
Et puis tu n’as jamais été du genre à cafter, en tout cas pas auprès de la Shapiro qui ne t’inspire pas la moindre envie d’échanger des potins et des conseils autour d’un thé matcha. Foutues tendances qui te font avaler cette merde deux fois par jour alors que le gout est immonde.
Tu voles un deuxième raisin. Il ne sera pas le dernier. Abel ne dit rien de tes sales manières, pour le moment.
Tu n’as même pas les mains propres. Alors, avant de t’asseoir, tu te diriges en sautillant jusqu’à l’évier où tu laisses couler l’eau chaude sur tes mains que la fraicheur matinale a rendues froides et sèches.
Tu peines à rester concentrée sur ce qu’il dit, à l’idée de l’avalanche de textos qui s’abattra sur toi lorsque tu rallumeras l’objet du diable.
Tu reprends le fil à l’évocation de la pensée positive qui ne t’évoque rien de plus qu’un haut le cœur. Ou peut-être est-ce, de nouveau, l’odeur du bacon cuit.
Ton visage se tord en une grimace que tu ne tentes pas de contrôler, il sait déjà ce que tu en penses. Ça et le matcha, une mode de plus à laquelle il faudrait adhérer, une mode de plus qui te glisse dessus comme le doigt chaud du père Lockwood, un frisson de dégoût parcourt ton dos.
Tu fais mine de sceller tes lèvres lorsqu’il exige ta connivence, dresse deux doigts en l’air. V de victoire, pourquoi ces foutus hippies en ont fait leur signe de paix, c’est complètement con…
Dans un rire suraigu et mielleux d’adolescente que tu n’as jamais été.
Tu voudrais cracher le morceau, là, penchée au-dessus des corps exsangues des oranges qui te donnent l’envie folle de croquer à pleines dents dans leur peau amère. Fucking pregnancy cravings.
Tu ne dis rien.
Il mime un maitre yogi à la con, ou quelqu’un dans le genre paix et amour, not your thing.
Tu prononces en détachant chaque main, le haut de ton corps oscille d’un côté à l’autre alors que tu engouffres deux raisins de plus.
Tu saisis l’occasion.
Tu caches toute ta gêne derrière le verre dont tu avales le contenu en quelques gorgées qui embrasent ton estomac.
@Abel Shapiro, c'pas fou, déso...
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Qu’à cela ne tienne, Shapiro aime défier le destin.
Le jus d’orange posé devant Diana, Abel vient s’installer à table en face d’elle et observe avec une certaine satisfaction le travail abattu en moins de quelques heures. Relevant son regard bleu vers sa convive, il doit se répéter plusieurs fois les mots qu’elle vient de prononcer pour les imprimer correctement. I shoulda’ said mamma… ‘Guess manifesting is real after all… Shapiro cligne des yeux, « what did you just say? » ses sourcils se froncent pendant une brève seconde avant qu’un éclat de génie vienne balayer tout doute possible dans son regard. Ca y est, il a compris. « Are you… ? » il ne peut s’empêcher de la dévisager, comme s’il essayait de déceler un changement physique chez elle, un truc qu’il aurait du voir et qui aurait du lui mettre la puce à l’oreille. Enfin, ce n’est pas comme s’il côtoyait régulièrement des femmes enceintes, hein, parce que c’est bien de ça qu’il s’agit, non ? « Shit... Who the fuck knocked you up ? » la question qui lui brûlait les lèvres ne peut être retenue et déborde. Abel ne sait pas s’il doit être content pour elle ou inquiet, il ne sait pas si c’était un événement désiré, voulu, ou bien un accident. Il sait qu’il est arrivé à Diana d’aller avec des mecs, mais de là à se faire engrosser… « Ohhh... I get it now… no mimosa, » captain obvious vient de se réveiller.
@diana hughes
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